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~Antre de Riku-san~

Samedi 24 avril 2010 à 19:23

Titre : Soirée bien arrosée
Date de création : 30 août 2009
Genre : Réalité - Léger humour
Note personnelle : J'ai changé la réalité mais je me suis réellement occupée d'une Amie bourrée. Je me levais toutes les heures dans la nuit de mercredi à jeudi pour être sûre qu'elle ne soit pas sur le dos.

« Excuses moi...
_ Tu n'as pas à t'excuser, arrêtes.
_ Je m'en veux de me montrer aussi pitoyable... »
Je m'agenouille au bord du lit pour te regarder de plus près, passant le bout de mes doigts sur ta joue encore humide de morve. Tu as passé la soirée à picoler, à te torcher la gueule, et voilà que tu es chez moi, dans la chambre d'amis, à vomir tes tripes et à t'excuser pour tout ce merdier. Te voir aussi faible me rend malade. Jamais je n'aurai pu imaginer que tu te laisserai plonger dans l'alcool, à boire en solo des culs secs sans trouver le moyen de t'arrêter. Si j'avais su...
Tes yeux sont remplis de larmes que tu ne laisses pas couler, tu poses ton regard sur moi, implorant. Tu aimerai que ton calvaire finisse et je te comprends parfaitement... J'ai la phobie de vomir alors je sais ce que tu ressens. Timidement, tu attrapes la peluche « tigre blanc » que je t'ai si gentiment prêté pour la nuit et tu murmures d'une voix chevrotante :
« Tu n'es pas fatigué ? »
Et je réponds de but en blanc :
« Pas assez pour m'en aller maintenant.
_ J'ai peur de rester seul.
_ Ne t'inquiète pas, je suis là. »
Je remarque alors que tes yeux fixent la bague à ton doigt. Il s'agit de l'alliance de ton père, celle où il y a gravé son nom et celui de ta mère défunte, ainsi que leur date de mariage. Je repense alors à ta génitrice. Elle était si belle, si souriante. Une japonaise que ton père avait rencontrée à Paris. Combien de fois l'histoire avait-elle été racontée ? Je me souviens de ses éclats de rire lorsque ton père racontait l'une de ses blagues idiotes. Ou encore de ses longs cheveux noirs qui flottaient au vent alors qu'elle prenait soin de ses rosiers. Elle était tout simplement magnifique. Lorsqu'elle a perdu la vie en montagne, plus rien n'a été pareil. Nous avions tous perdu quelque chose de précieux. Quand je parlais avec elle, à l'abri des oreilles indiscrètes, elle ne me jugeait pas et tentait simplement de m'épauler sans pour autant me donner de conseil.
Aujourd'hui, alors que tu vomis tout l'alcool et la tarte flambée que tu as ingurgités, je vois à quel point les choses ont évolué dans un sens mauvais. L'alcool a pris le dessus sur ta vie et tu bois à la première occasion, au grand dam de ton père. Malgré moi, je cherche déjà une excuse que tu pourrais présenter à ton paternel lorsque tu rentrera chez toi demain matin. C'est alors que je t'entends marmonner :
« Connasse... »
Aussitôt, je me crispe. Serais-tu en train d'essayer de me parler ? De te livrer un peu pour expier tes erreurs et démarrer une nouvelle vie ? Je n'ai pas le temps de me poser des questions aussi farfelues. Je te regarde, passe le bout de mes doigts dans tes cheveux fins. Tu as hérité de la beauté japonaise de ta mère...
« De qui parles-tu ? Demandais-je.
_ Ce n'est qu'une connasse... »
Je saisis alors le sens de ces paroles. Ton père a rencontré une femme il y a quelques mois et, depuis plusieurs semaines maintenant, elle vit avec vous dans votre luxueuse maison campagnarde. Je l'ai vu deux ou trois fois et je ne l'ai pas trouvé sympathique. Plutôt antipathique même. C'est alors que je sens la douleur irradier de ton corps. Depuis tout ce temps, tu gardes ta rancune au fond de toi sans jamais avoir osé en parler avec ton père. J'essaie de trouver les mots adéquats.
« C'est ta vie, pas la sienne. Pour le moment, ne t'occupes pas d'elle, occupes toi de toi. Il faut que tu ailles mieux. La priorité, c'est que tu te reposes. »
Un léger ricanement traverse tes lèvres. La pression monte. Je me sens mal... Je te vois te pencher, saisir rapidement la bassine et vomir une énième fois dedans. Moi, je me lève, recule légèrement. Je veux rester mais je ne supporte pas l'odeur de gerbe. Ca me donne envie d'en faire autant, même si je n'ai pratiquement rien dans l'estomac. Pourtant, avec ma phobie de vomir, je refrène cette horrible pensée et je t'observe avec difficultés. Vraiment, te voir ainsi me rend triste. Jusqu'à maintenant, tu te faisais passer pour quelqu'un de fort, comme moi. Et je crois que la réalité des choses a du mal à percer en moi –on reste des êtres humains avec des sentiments et des émotions, même si on ne les montre pas.
C'est alors que je m'entends dire :
« Tu n'as pas à t'excuser pour tout ça. Tout le monde a le droit de se laisser aller de temps en temps. Tu crois sincèrement que je ne pleure jamais ? »
Tu me regardes, je le sens. Doucement, tu reposes la bassine sur le sol et tu fermes tes paupières. Mes mains sont gelées, j'ai mal aux yeux. J'ai envie de bailler mais je me retiens. Je ne bouge plus, reste fixé sur le même endroit jusqu'à en avoir mal à la plante des pieds. Le sol craque légèrement mais je ne veux pas te déranger dans ta léthargie. Lentement, je vois ton bras s'affaisser, se poser sur le matelas. Ta respiration devient plus lente, plus grave. Enfin, tu trouves le sommeil.
Je reste à la même place durant un laps de temps inconnu. J'ai mal aux pieds, mes genoux me tirent, mais je m'en fous. Je te regarde avec une compassion doublée d'amertume. Il fallait que tu te bourres la gueule et que tu gerbes pour te livrer un strict minimum à moi. On se connaît depuis plus de quatre années mais je ne connais pratiquement rien de toi. Je m'en rend compte maintenant. J'ai toujours dis aux gens que tu étais une des seules personnes que je respectais entièrement... sans même savoir ce que tu étais réellement. Aujourd'hui plus qu'hier, je me sens proche de toi. Je sais que cette illusion s'effacera dès que tu retrouvera ton punch habituel mais je tiens à garder ce souvenir dans ma mémoire.
Doucement, je me recule vers le mur, m'y adosse, me laisse glisser jusqu'au sol. Mon regard ne quitte pas ton visage aux traits désormais doux, mes sourcils se froncent dans une expression de profonde détresse et mes larmes se mettent à couler dans le silence de la nuit. Je ne pourrais réellement expliquer ce que je ressens mais je sais qu'on a tout de même fait un grand pas dans notre amitié. J'ai pu te prouver à ma manière que je ne te lâcherai pas – tu as pu me montrer à ta manière que tu me faisais un minimum confiance.
Et alors que le sommeil m'emporte doucement avec lui, je revois avec détails le fameux sourire de ta mère, son corps si svelte sous ses robes de modèles Gothic Lolita. Je l'adorais... Et je t'adore tout autant. Je crois même qu'en cette nuit de perdition, ce sentiment que j'ai pour toi est bien plus profond.

La lumière du soleil traverse mes paupières, réduisent mes rétines à un état de douleur sans nom. Je gémis et bouge légèrement. Je suis courbaturé de partout, j'ai surtout mal au dos et au cul. Putain, qu'est-ce qui s'est passé ? J'ouvre difficilement les yeux, entend un bruit de craquement de bois non loin. Devant moi, tu es là à me sourire légèrement, encore endormi mais assis sur le matelas. Faudrait penser à changer ces putains de lattes du sommier parce qu'elles craquent de plus en plus. Je cherche un appui, trouve la poignée de la porte, m'aide à me relever avec celle-ci. Enfin sur mes pieds, je m'étire le plus souplement possible en faisant craquer mes os. Plus jamais, ôh Grand, plus jamais je ne dormirai par terre !
Je m'approche du lit, m'assois sur le bord du matelas, te regarde.
« Alors, ça va mieux ? »
Ta voix est rocailleuse, ton souffle sent la pourriture mais tu me souris toujours légèrement et marmonne :
« Ouais. J'espère que tu m'en veux pas. »
Les choses redeviennent normales. Cette nuit, tu t'excusais ouvertement. Maintenant, tu t'excuses à la façon dont je connais le plus : tu prends le chemin le plus long.
Je souris, penche la tête sur le côté.
« Maintenant, tu vas prendre une bonne douche et abuser du dentifrice. »
Je me lève, vais dans la chambre de ma sœur déjà partie au boulot et pique une grande serviette dans son armoire. Vite fait, je passe par ma piaule et cherche des fringues qui pourraient aller à ton corps assez athlétique et surtout plus grand que le mien. J'opte pour un pantalon large aux poches latérales et un Marcel beaucoup trop grand pour moi.
Après quelques minutes, te voilà sous la douche. Et moi, je remarque enfin que j'ai quelques croûtes sous les yeux. Putain, j'ai réellement pleuré... J'espère que tu ne l'a pas remarqué quand j'étais assis à côté de toi. J'aime pas que les gens sachent que je puisse pleurer, bien que je te l'ai avoué cette nuit. Te rappelles-tu de tout ce qui s'est déroulé ? Je ne chercherai pas à te faire recouvrer la mémoire. C'est bien mieux si tu ne t'en souviens pas.
Tu ressors de la douche, tout frais, et places du dentifrice sur ton doigt à la Système D. Je t'observe alors que je m'habille pas loin, un léger sourire aux lèvres. Je préfère nettement te voir comme ça. Avec la chaleur qu'il fait, je ne mets pas directement un haut et je fonce allumer le PC. Tu m'y rejoins quelques temps plus tard dans ton mutisme que je connais si bien. Nos regards ont toujours suffit pour qu'on se comprenne. Alors je pose mes prunelles sur toi, te souris. Les cheveux ébouriffés, ça te va très bien. J'hésite à te le dire puis, finalement, je prononce :
« Le coiffage en pétard n'est pas si mal sur toi. »
Et, avec ton humour habituel, tu te passes la main dans les cheveux et tu réponds du tac au tac :
« Je sais. Je le vaux bien, voyons.
_ Mais oui, mais oui. »
Je ris légèrement, je fixe l'écran de l'ordinateur. Tu le vaux bien, oui. Mais jamais je ne te le dirai.
La matinée passe très vite. Finalement, moi qui voulais te ramener, je me retrouve condamné à devoir rester à la maison pour surveiller ma grand-mère atteinte de Parkinson. Je rends tes clés que ma sœur t'as confisqué hier soir pour être sûre que tu ne rentres pas complètement blindé, et on se dirige vers ta Punto. Je ressens une horrible douleur dans un coin de mon torse –sans vouloir préciser lequel- et je me force à sourire alors que tu ouvres la portière côté conducteur. Une fois celle-ci refermée, tu ouvres directement ta fenêtre en grand.
« Viens par là. »
Je m'approche, sourcil haussé.
« Qu'est-ce que tu veux ?
_ Te dire au revoir. »
Tu passes ton bras dehors, tes doigts choppent ma nuque et me forcent à me baisser. Ton visage s'avance vers le mien et tu m'offres un rapide et léger smack sur les lèvres. Surpris, je ne daigne pas comprendre ce qui arrive. Tu me souris puis tu enchaînes simplement :
« Je te préviendrai quand je serai arrivé. Passe une bonne journée. »
Marche arrière, marche avant, coup d'accélérateur et hop, te voilà parti. Il m'a fallu deux bonnes minutes pour m'en rendre compte. Finalement, j'éclate de rire tout seul, comme un con, sur le trottoir. Toi et ton humour de débile ! En fait, tu m'as simplement tapé ce smack comme remerciement parce que tu es trop fier pour le dire de vive voix. Et même si j'ai un léger pincement au cœur, je continus de rire alors que je rentre, monte à l'ordinateur et attends le moment où tu viendra me dire que tu es arrivé.

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